jeudi 11 juin 2015

LES SOLDATS DE L'AUBE

Les soldats de l'aube

Dead at Daybreak - Deon Meyer - Hodder and Stoughton - 2000

Edition française - Seuil - 2003

L'histoire

Zatopek Van Heerden est un ancien flic des Vols et Homicides. Au bout du rouleau. Alors quand un ami avocat vient le sortir de cellule après une bagarre dans un bar et lui demande un petit service en échange, il est loin de se douter que le testament qu'il doit retrouver en moins de huit jours pour le compte d'une avocate est le fruit empoisonné d'une affaire vieille de plus de vingt mêlant des militaires et la CIA dans des opérations anti-guérilla.

Mais quel est le rapport entre un cambriolage avec tortures au chalumeau et exécution au fusil d'assaut M16 et le testament d'un négociant en antiquités menant une vie bien paisible?
Sept jours de délai, sept jours pour remonter loin dans son passé afin d'essayer de comprendre qui est-il réellement.

L'extrait: page 230

"Il s'en était remis. Il avait fait ce qu'il fallait pour s'en sortir. Et s'était retrouvé du bon côté de la vie lorsque deux, presque trois ans plus tard, la douleur étant contenue, seule lui était restée la connaissance de soi. La connaissance de soi et ce qui en découlait: rien ni personne ne comptait, l'humanité n'était faite que de brutes et d'êtres primitifs qui passaient leur temps à manipuler les autres et, sous les apparences d'un comportement civilisé, ne faisaient jamais que lutter pour survivre... Tout le monde était mauvais. Mais les trois-quart des gens n'avaient pas l'occasion de s'en apercevoir.
Et voilà que sa mère voulait qu'il fasse ce qu'il fallait. Survivre, c'était ça qu'il fallait faire. S'assurer que personne n'allait faire chier."

Le personnage principal

ZATOPEK van HEERDEN a trente-huit ans. Vu le prénom, les gens l'appellent plutôt par son nom de famille ou par le diminutif "Zet" pour les intimes. il doit ce prénom à son père, Emile Van Heerden, qui admirait le coureur de fond tchécoslovaque triple médaillé en or aux JO de Helsinki en 1952.

Son père est mineur, travaillant à l'extraction du diamant brut mais sera emporté par un éboulement alors que Zatopek est âgé de six ans: un peu râpé pour la figure et présence paternelle!
Sa mère, artiste peintre renommée dont les tableaux se vendent un peu partout dans le monde, a éduqué son fils dans l'amour des belles choses telles que la musique classique et Mozart en particulier.

Il possède une Toyota Corolla et habite une petite maison sise non loin du domaine plus vaste où réside sa mère qui, parallèlement à son activité artistique, s'occupe d'un élevage de chevaux. De temps en temps Zet, très bon cuisinier, mijote un petit repas pour un dîner en tête à tête avec sa mère.

La description des scènes de sexe est assez explicite chez Deon Meyer. Dans ce roman, pour bien comprendre l'état d'esprit de Van Heerden, le récit de son enquête sur le testament alterne avec des chapitres flash-back où Zatopek s'adresse au lecteur pour lui raconter sa vie. Et l'on apprend tout de sa découverte des mystères puis des plaisirs de l'amour et du sexe révélés avec pas mal de détails, des évènements marquants modifiant sa vie qui sont liés à sa découverte du sexe.

Lors de cette période pré-adolescente aux hormones en folie, il fantasme particulièrement sur sa voisine, une femme mariée d'une trentaine d'années qu'il a surpris et épié alors qu'elle se masturbait dans son jardin tout en prenant un bain de soleil. Sa mort horrible et cruelle sera un élément déclencheur majeur dans sa décision de rentrer dans la police.

Van Heerden passe deux ans en uniforme et en profite pour suivre des cours du soir, non pour devenir inspecteur (la promotion habituelle) mais pour le concours de criminologie et sciences de la police.
Il effectuera même un stage à Quantico, Virginie, USA.

Étant devenu chercheur universitaire, il reprends une vieille affaire pour en tirer un mémoire de thèse, découvre des indices non exploités auparavant qui le mènent en Australie ou il débusque, aidé par les flics du cru, un tueur en série (37 victimes) appelé "L'assassin au Scotch crêpé". il devient connu aussi bien en Australie qu'en Afrique du Sud où WILLIE THEAL, patron des Vols et Homicides l'enjoint de rallier ses rangs et de bosser à la criminelle.

Van Heerden va donc rencontrer et travailler avec TONY "Nougat" O'GRADY et MAT JOUBERT, deux inspecteurs qu'il retrouve dans ce livre lors de l'enquête du testament. Étant piètre tireur, il ne supporte pas les scènes de crime, vomissant chaque fois, ce qui lui vaut des petites piques de la part de ses collègues.

Petites piques qui ne sont que caresses comparées aux torrents d'ironie et de condescendance doublée de pure méchanceté dont l'abreuve son mentor à la criminelle, WILLEM NAGEL. C'est le meilleur professionnellement mais humainement il est détestable: il est plein de flatuosités ( il pète tout le temps et partout), sexiste, raciste, coureur de jupons, vantard et m'as-tu-vu.

Et pour Zatopek, ce qui va provoquer sa profonde déprime et sa démission de chez les flics est à mettre sur le compte de sa sexualité et de son attirance pour la gente féminine. Nagel est marié mais garde jalousement sa femme à la maison, lui interdisant de travailler et vérifiant souvent par téléphone qu'elle n'est pas sortie de la maison.

Lors de leur rencontre, c'est le coup de foudre réciproque et l'histoire d'amour durera jusqu'à la mort de Nagel alors qu'ils essaient d'interpeller "le tueur au ruban rouge", un homme suspecté du meurtre de dix-sept prostituées. Pendant la fusillade, son inaptitude au tir l'a empêché de pouvoir défendre son collègue. Van Heerden en nourrira une rancoeur féroce à l'égard de tout membre du corps médical car à l'hôpital, l'urgence fait passer le tueur en premier sur le billard: il en réchappera, pas Nagel.

Les seconds rôles

Zet Van Heerden a travaillé plusieurs années au département des Vols et Homicides; il a donc rencontré et côtoyé nombre de flics déjà cités dans "Jusqu'au dernier".
Le capitaine Mat Joubert, "héros" du précédent roman, intervient assez activement pour soutenir l'action de la police et pour défendre "Nougat" O'Grady qui a eu la responsabilité de l'enquête sur le cambriolage suivi de tortures puis de meurtre. Joubert évoque aussi son mariage proche avec MARGARET WALLACE, La femme d'une victime du tueur au Mauser rencontrée dans "Jusqu'au dernier".

BART De WIT et Willie Theal, actuel et ancien chef du service des homicides sont plus discrètement cités. C'est aussi le cas de KEMP, dont on ne connaît pas le prénom et dont on se dit qu'il pourrait bien être celui qui tire les ficelles de cette affaire. Kemp, avocat et ami qui lui demande de contacter une avocate, ancienne collègue passée dans le privé: "Il était grand, fort et bien propre sur lui dans sa veste sport."

Cette avocate, HOPE BENEKE, trente ans, plutôt jolie, va avoir des rapports assez particuliers avec Van Heerden, une relation empreinte de défiance et de réserve au début qui évoluera positivement quand les évènements marquants qu'ils subiront les lieront dans l'adversité et la violence.

Comme Zatopek ne peut compter sur l'aide de la police, ses anciens collègues soucieux de garder un peu d'avance dans son enquête, il est obligé de faire appel à ORLANDO ARENDSE, parrain des gangs du Cap, pour obtenir des armes, une protection rapprochée ainsi que des tuyaux concernant le blanchiment d'argent et le trafic de diamants.

C'est ainsi que THOBELA MPAYIPHELI dit "P'tit" devient dans la dernière partie du livre son compagnon d'enquête et son bras armé. C'est un homme de main employé par Orlando après que la réconciliation nationale ait amnistié tous les anciens "terroristes" de l'ANC. En Effet, "P'tit" s'est enrôlé très jeune dans la Lutte, apprenant le tir et les tactiques en URSS dans des camps militaires soviétiques proches de l'Afghanistan.

Deon Meyer cite quelques unes des nombreuses ethnies/tribus qui composent l'Afrique du Sud et alentours: les deux plus importantes en nombre sont les Zoulous et les Xhosas. Nelson Mandela, Miriam Makeba, Desmond Tutu entre autres sont d'origine Xhosa. Il cite aussi les Tswanas, les Sothos, les Vendas, les Sepedis et les Tshivendas.

Ceci pour bien faire comprendre au lecteur la complexité des rapports non seulement entre les blancs et les noirs mais également la subtilité des différences à l'intérieur d'une même "couleur". Et quand on ajoute les immigrés venus de plus haut en Afrique ou de plus loin du côté de l'océan Indien ou de l'Asie, venus pour certains depuis plusieurs générations, des fois avant même avant l'instauration de la loi d'apartheid. Pour couronner le tout L'Afrique du Sud compte onze langues officielles et trois capitales: Pretoria est la capitale administrative, Le Cap est la capitale législative et Bloemfontein la capitale judiciaire.

L'enquête

Dans les deux premiers romans, l'auteur double l'intérêt du lecteur (pour l'embrouiller), grâce à deux enquêtes conjointes dans "Jusqu'au dernier" et deux histoires distinctes, l'une étant la prequel de l'histoire contemporaine racontée. Similitude aussi avec la personnalité troublée, presque au bout du rouleau du personnage principal rongé par le doute et la culpabilité.

Le chapitrage des évènements contemporains est un compte à rebours journalier.

Jeudi 6 juillet: septième jour


Van Heerden émerge au petit matin dans une cellule après une soirée dans un bar qui a dégénéré en bagarre. Kemp, son ami et avocat vient le récupérer sans charges retenues contre lui en échange d'un "petit service" à rendre à une ex-collègue.
Sa cliente doit retrouver un testament dérobé il y a dix mois lors d'un cambriolage suivi du meurtre du maître des lieux d'une balle de M16  dans la nuque après avoir été torturé à la lampe à souder.

Vendredi 7 juillet: sixième jour

Zatopek commence à fouiller dans le passé de la victime, s"embrouille avec l'avocate Hope Beneke, lâche l'affaire mais un indice va le faire revenir sur sa décision: la victime avait une fausse identité, certainement à cause d'un passé à oublier, à effacer.

Samedi 8 juillet: cinquième jour

Van Heerden continue de lutter contre ses démons, partagé entre l'envie dévorante de trouver la vérité et le découragement. Il termine la journée en cassant la gueule d'un médecin alors qu'il était invité à une réception. Il ne faut pas dire du mal de Mozart devant lui.

Dimanche 9 juillet: quatrième jour

Malgré le bordel créé par Van Heerden, un compromis est trouvé et un article paraît dans les principaux journaux pour essayer de joindre des personnes qui auraient connu la victime avant son changement d'identité.

Lundi 10 juillet: troisième jour

La diffusion dans les médias de l'avis de recherche permet une avancée dans l'enquête: l'identité véritable de la victime, reconnue dans l'avis par sa mère mais aussi par un inconnu qui a l'air de savoir très précisément ce qui s'est passé et ce qui risque de se passer.
Les flics s'en mêlent, Joubert, O'Grady et De Wit reprochant à leur ex-collègue de les avoir traînés dans la boue à cause des articles de presse très critiques quant à l'efficacité de la police dans cette histoire.

Mardi 11 juillet: deuxième jour

L'affaire commence à avoir des implications politico-militaires. Une injonction du tribunal oblige Beneke et Van Heerden d'arrêter leurs recherches et de livrer tous les documents en leur possession. Pendant le transfert au poste de police , ils sont attaqués et le major qui l'accompagnait meurt dans "l'accident".

Mercredi 12 juillet: premier jour

Un consensus négocié entre Van Heerden, les forces de police et le renseignement militaire lui permet de continuer tout en se limitant à la recherche du testament. Ayant été menacé dans l'accident, il s'organise pour protéger ses proches.

Jeudi 13 juillet: jour J

Un appel anonyme révèle l'endroit où est supposé se trouver l'homme qui à menacé Van Heerden en lui mettant un pistolet sur la tempe lors de l'accident, personnage-clé supposé de l'affaire. Mais l'armée le grille sur ce coup-là, l'homme est déjà mort, une mort qui n'est qu'une diversion permettant d'amoindrir la protection rapprochée dont bénéficient ses proches quand la maison de Joan Van Heerden est prise d'assaut par quatre hommes armés.  
Trois d'entre eux sont tués, un quatrième grièvement blessé à coup de bêche. un autre cadavre est découvert par Van Heerden, décidé à jouer franc-jeu, ou presque, avec ses anciens collègues flics pour griller les hommes du renseignement militaire.






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